dimanche 1 juin 2014

#0008 AMRCN DANDIES.

TAKAHIROMIYASHITATheSoloIst. Symphony #0008 AMRCN DANDIES.


AMRCN DANDIES est la huitième symphonie interprétée par Takahiro Miyashita en tant que soliste. Le titre à l’écriture syncopale suggère l’agencement des différents mouvements de la collection.
A la musicalité qu’il veut transmettre depuis le lancement du label (et que j’essaierai de respecter au fil du texte) se mélangent de nouvelles références. Lorsque cette composition fut présentée Ce fut aussi le moment choisi par Gatsby le Magnifique pour revenir sur grand écran. Cette fois c’est Baz Luhrmann qui nous emmène à la rencontre du plus célèbre des dandys de fiction. Américain qui plus est. Mais attention à ne pas s’y méprendre car à la question de la représentation et du concept de sa collection, le designer répond simplement qu’il s’agît d’une gamme inspirée de sa propre garde-robe ; portable en toutes occasions. Quand on sait que dandy est synonyme d’excentricité et que l’on connait le personnage, on ne peut que le croire.


[lookbook officiel]

 Beaucoup de blazers trois et quatre boutons dérivés en trois coupes intitulés american continental (3 boutons) et british continental (4b) pour les deux versions les plus luxueuses, disponibles en noir, marine et camel.
Le nom « continental » fait référence au « style continental » qui n’est autre que le nom américain donné au « style italien » ou « style romain ». C’est à la maison italienne Brioni que l’on doit la création de ce type de costume. Présenté une première fois en 1952 à Florence, il entame dès 1954 à New-York une série de défilés à travers tout le pays. Promu grâce à des films comme Vacances Romaines ou La Dolce Vita et porté par des vedettes hollywoodiennes ; il est souvent montré dans le magasine LIFE. Il n’en fallait pas plus pour que le continent se l’approprie.
La troisième coupe est bien plus courte (4b). Les poches sont plaquées mais sans rabats contrairement aux deux premiers modèles. Elle se nomme sport et se décline dans plusieurs coloris et matières. Gris, marine, olive, prince de galle ainsi que des versions en velours et velours côtelé de coton noir ou marine ainsi qu’une dernière en laine de chameau. A toutes ces vestes se joignent évidemment les pantalons qui correspondent, respectivement intitulés hollywood waist et plain front pants. Une gamme façonnée entièrement en laine mais de densité différente entre les deux variantes.



[theSoloIst Plain Front pants et theSoloIst Hollywood Waist pants]

 Le manteau chesterfield (manteau à boutonnage dissimulé) coutumier de l’offre de Miyashita est encore présent mais un dérivé lui est cette fois-ci accordé : le semi-chesterfield qui n’est autre qu’un manteau Ulster (manteau à double boutonnage). Les coloris sont identiques aux vestes continental et au pantalon hollywood, avec une texture nuancée toutefois, puisque cette pièces intègre un tiers de cachemire dans sa composition.
On retrouve également des pièces qui marquèrent les saisons précédentes comme la rain jacket dérivée en noir et brune qui fut présentée en beige avec le traitement spécial earth-dye (application de teintures naturelles sur les vêtements) pour la symphonie #0005. Cette pièce consiste toujours en un patchwork de plusieurs cuirs différents tels que la vachette, le kangourou et le cheval. Sans le traitement son prix a été divisé par 3.
Les fameuses doudounes à l’insertion de cuir sauvage sont de nouveau au rendez-vous. La version veste et la version gilet possèdent toutes deux des poches plastron ainsi que des épaulières en daim. Clairement inspirée des vestes de chasseur ou ces poches servent à ranger les cartouches et les parties de cuir à stabiliser la crosse du fusil. Les couleurs en découlent, vert, marron orangé et noir.



[theSoloIst Hunting Down Vest]

 La famille de cuirs s’enrichie d’un vêtement original. Dotée d’une doublure apparente à la bordure volontairement imparfaite et caractéristique ; il s’agit d’un t-shirt au col V prononcé intitulé motorcycle t-shirt. Les tonalités favorites du designer sont présentes mais la palette s’agrandie de teintes bienvenues comme le kaki et le camel ; très présents dans le lookbook. Parmi les dernières nouveautés notoires, une gamme de chemises et marcels est incorporée (reprise depuis pour l’été 2014).


Avec une continuité certaine dans son travail, l’attention portée aux détails par Takahiro Miyashita est poussée ; sans toutefois jouer de surenchère. Car, suivant son thème il ne rajoute pas d’élément frivol sur les surfaces de tissu vierges. Des attributs qui caractérisaient les collections pré-2013.
Arrêtons-nous d’abord sur un détail mis en avant sur de nombreuses pièces de cette collection : la doublure plus longue que la manche (ou la jambe) et taillée sèchement en son extrémité ; faite pour s’effiler avec le temps. Cette finition introduite sur les pièces resized de la collection été 2013 est véritablement devenue une note dominante de cette 8ème symphonie. Noire ou blanche elle ponctue de belle façon les pièces de costume.
Si l’on devait trouver travail approchant dans l’univers de la mode, ce serait chez Elena Dawson. En effet, la couturière qui cofonda la ligne de vêtements du chausseur Paul Harnden en 2000 achève ses créations de la sorte depuis le lancement de sa marque en 2006. Ses poches passepoilées, construites avec un espacement qui révèle la doublure sont un autre élément que l’on retrouve chez TheSoloIst.
Une autre singularité et non des moindre que l’on retrouve sur les costumes de Takahiro Miyashita comme sur ceux d’Elena Dawson est qu’ils sont dépourvus de liseré en bordure de vêtement. Un duetto couplé à la doublure.
[détails des poches et finitions de SoloIst hiver 2013 à côté d’Elena Dawson hiver 2013]

 On pourrait aussi citer Boris Bidjan Saberi pour ces mêmes caractères mais son univers est nettement moins adjacent que celui de la créatrice anglaise.
La collection possède aussi une certaine affinité avec Lanvin. Le Lanvin d’Alber Elbaz et son point signature dit ‘déconstruit’ où les parties de textile cousues l’une sur l’autre donnent du relief à la couture et laissent subtilement apparaître la doublure d’une autre couleur. Le créateur japonais réalise ici un montage comparable sur les vestes comme sur les pantalons.


[theSoloIst hiver 2013 et un classique de chez Lanvin]

On peut même observer quelques pièces Number (N)ine remises au goût du jour. Ainsi le Motorcyle Tee n’est qu’une version améliorée d’un exemplaire produit en 2003. La pièce était en peau de cochon et possédait deux fermetures éclaires latérales contre une grande diagonale dorsale pour celui de 2013. Le blazer de velours a lui aussi garni les défilés de plusieurs collections du label défunt. Des longs aux épaules pagode de 2001 jusqu’à ceux de l’hiver 2007 ornés de pointes de flèches, nous retiendrons un exemplaire décontracté à la doublure imprimée paisley de 2003 lui aussi.


[de gauche à droite: hiver 2001, été-hiver 2003, hiver 2007, hiver 2013: édition limitée pour Nepenthes à la doublure violette]

 Si l’on devait encore citer une collection où l’on retrouve cette parenté évidente ce serait sans hésiter la très appréciée My Own Private Portland qui comprenait essentiellement des pièces portables tous les jours, modulables les unes aux autres. Ainsi Takahiro présentait des gilets molletonnés déclinés dans les mêmes coloris que les vestons de chasse. Le velours fut à l’honneur sur des vestes doublées de fourrure, aujourd’hui parmi les plus cotées sur le marché de l’occasion. Les chemises en flanelle s’effilaient déjà et les tenues imaginées pour le défilé furent accessoirisées de la même manière. On retrouvait des chapeaux décorés de plumes ainsi que des bijoux représentant des cerfs. Le cervidé s’exhibait autour du cou alors que maintenant sa figure orne des bagues.
Quant au nom limpide de la collection, il définissait un vibrant hommage au septième art.


[chapeau, colliers et gilet de l’hiver 2008, bagues de l’hiver 2013]

(Cette ultime partie est menée de manière plus suggestive et s’apparente plus à une envolée pensive de ma part car en effet j’aime envisager, concevoir un fond implicite à une collection si celle-ci me fascine. Si les recherches d’inspirations et études diverses vont un temps il s’avère aussi amusant de se plonger dans l’esprit du designer.)


 Avant le lancement de sa collection, Takahiro Miyashita proposait dans sa boutique de Tokyo deux t-shirts hommage à Retour vers le Futur. Une indication quant à l’orientation de sa collection ? Peu concevable si l’on observe les pièces en showroom ou sur le lookbook.
Ils sont toutefois l’invitation à une nouvelle virée. Un voyage dans le temps en compagnie de ce Dandy ; l’énigmatique aventurier et séducteur.
Courts et intenses sont ses récits qui détonnent avec la sophistication de ses tenues.
Amoncellement de mémoires, c’est ainsi qu’il les compose ; comme l’on composerait une symphonie.
D’aucuns racontent qu’il a déjà mené à terme sept aventures.
S’habillant d’épatants manteaux et costumes empruntés aux colons de l’empire. Laine, cachemire ou soie ; les belles étoffes lui sont familières et lui permettent de s’intégrer aisément parmi les hautes classes de la société. Ses parures cèdent au temps leurs extrémités émaillées.
Il accommode ses tenues avec d’autres pièces prises aux cowboys comme des bottes western lacées ornées de franges. Son inévitable chapeau s’orne de plumes et le cordage lui sert désormais à attacher clés et portefeuille.
Pour ses escapades les plus hâtives il préfère la moto. T-shirt de cuir et gants de conduite empreints de décorations macabres sont le vestige probable d’un rattachement concis à un groupuscule de biker.
Ses vêtements reflètent ses loisirs et ses excursions. Tout en graduant sa tenue de teintes cohérentes, il ose le contraste de matières représentant des époques bien distinctes. Un jogging ou une doudoune matelassée viennent facilement trouver leur place dans sa garde-robe.
Il est un homme rapide et ne s’encombre pas.
« Keep walking ! » vous dirait’il.



.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire